Dahflo, voilà un nom simple pour une artiste complexe. Diplômée de l’EPFL en architecture et passionnée par le dessin, Dahflo est la représentation même d’une créatrice polyvalente capable de mêler création et conception avec comme seule aide sa bombe de spray. A seulement 27 ans, cette artiste a déjà vécu plus de vie que la majorité de la population. Mais ce qui la différencie des autres artistes c’est l’intensité et la connexion qu’elle partage avec le monde qui l’entoure. Son univers et sa maîtrise ont fait d’elle un talent qui marquera Lausanne de sa bombe de spray.
Pourquoi le nom Dahflo ?
Je voulais un nom compact qui ne sonnait pas féminin, j’ai pris deux surnoms qu’on me donnait avant de faire du spray.
Est-ce que Dahflo et Delphine sont la même personne ?
Dahflo c’est le nom plus lié à mon identité artistique qui vient du graff.

Comment vis-tu le fait de devoir te séparer de tes œuvres ?
J’ai commencé il y a 3 ans. Ça fait pas beaucoup parce que je viens pas du milieu illégal ni du street art. Je m’intéressais au mouvement graffiti des années 70-90, car il regroupait l’aspect social, culturel, historique, industriel, aussi le fait que tout le corps rentre en action quand le graffeur peint. Je me suis dit : « il faut que j’essaie ! ». J’ai acheté cet été là 200 bombes, c’est à ce moment là que j’ai rencontré Averi qui m’a initiée dans un port assez atypique, à Saint-Brieuc en Bretagne.
Quel est ton rapport au dessin ?
Aujourd’hui, il y a une grande partie qui est de l’ordre d’émancipation, de catharsis, de flow et de ne penser à absolument rien d’autre. C’est une emprise totale, quand je dessine le monde s’arrête et il devient complètement cosmos. C’est un immense plaisir qui me permet de me recentrer et d’extraire mes émotions. Le figuratif est présent depuis petite. Je dessinais beaucoup de femmes nues sur mes cahiers, ça agaçait beaucoup mes profs. Tandis que les lines works sont venues bien plus tard vers la fin de l’école d’archi.
D’où te vient ce rapport particulier avec le corps des femmes ?
Si je veux être honnête avec moi même, comme plein de gens, j’ai mis beaucoup de temps à accepter mon corps. Depuis toute petite, je suis fascinée par le corps de la femme. Le fait de le dessiner était une sorte d’exploration de l’anatomie qui me servait inconsciemment à l’appréhender. Aujourd’hui c’est plus dynamique, mon corps fait partie de mon processus de création, il est une interphase qui me connecte entièrement à tous mes autres sens.
Concrêtement, tout est sujet d’inspiration, mais quand il s’agit de créer, je dois me mettre dans un état d’esprit bien particulier.
D’où viennent tes inspirations ?
De partout… ça peut être une odeur, une émotion, un regard furtif, des rêves, des voyages, des rencontres. Concrêtement, tout est sujet d’inspiration, mais quand il s’agit de créer, je dois me mettre dans un état d’esprit bien particulier. Mon vécu et sans doute le fait d’être extrêmement sensible, empathique au monde qui m’entoure jouent un rôle là-dedans. Après tout dépend du contexte, si je peins un mur, j’écoute beaucoup de musique électronique. Le matin, ça sera plutôt du classique, ça varie vraiment selon les émotions du moment.
Et quels sont les artistes qui t’inspirent ?
Egon Schiele, Klimt, Hugo Pratt, Toppi, Rodin, Mucha, Hayao Miyazaki (réalisateur mais artiste à mes yeux), De Staël, Baudelaire, Faith 47, Hopare, Christian Dior, Yves Saint Laurent et Mapplethorpe.
Comment tu vis le fait de devoir laisser une de tes créations à quelqu’un ?
C’est curieux, mais ça me dérange pas de laisser une fresque ou de vendre un tableau. Pour moi, c’est le moment de création qui compte le plus, ça se passe à un niveau tellement organique. Ce que je livre est authentique, on ne peut pas acheter l’instant et le moment de création.
Pour toi, l’art c’est quoi ?
Pour moi, c’est quelque chose de très holistique qui connecte tout, les souvenirs, vie, l’entourage, l’environnement, etc. Mais si je dois parler d’art urbain, je dirais plutôt qu’il est un catalyseur fédérateur qui et joue sur plusieurs dimensions sociales, culturelles, politiques, spaciales et urbaines.
Si tu devais te décrire en une phrase, qu’est-ce que tu dirais ?
Je suis une personne très mentale et empirique ainsi qu’intense, rêveuse, hypercurieuse, qui a besoin de mouvement tout le temps jusqu’au moment où mes batteries sont à plat et là, j’entre dans une phase plus introspective.

D’où te provient toute ton énergie ?
J’ai cette énergie depuis toute petite et je commence que maintenant à la canaliser. Elle doit me venir de l’amour que je donne et que je perçois des autres.
Quelles sont tes valeurs ?
Authenticité, intensité et liberté
Si tu pouvais donner un conseil à la Delphine 5 ans, qu’est-ce que tu lui dirais ?
« Keep you light shining »
Et dans 5 ans, tu te vois où ?
Vivre suffisamment confortablement de mon art pour pouvoir continuer à voyager, partir à la rencontre de gens et d’autres environnements, les vivres.
Qu’est-ce que tu aimerais faire comme œuvre dans l’avenir ?
J’aimerais mettre en relation les lines works en 3D et les connecter avec un mouvement de corps réel que ce soit par du mapping ou des médias plus charnels.
Pour toi l’underground alternatif c’est quoi ?
Ça me fait sourire quand j’entends l’underground suisse parce que pour moi l’alternatif c’est quelque chose qui sort des règles établies, mais c’est une idée un peu reçue. J’ai pu l’approcher de manière plus tangible ailleurs, à Berlin, Copenhague et dans d’autres pays.n relation les lines works en 3D et les connecter avec un mouvement de corps réel que ce soit par du mapping ou des médias plus charnels.
Pour terminer, tu te décrirais plutôt chic ou choc ?
J’imagine un mixte savant entre les deux.